Philippe de Bros, Direktor des Stadttheaters Luzern (Porträt).

Radio Suisse Romande, Espace 2, Musimag, fin janvier 1986.

 

 

Il y a trois, quatre mois seulement que Philippe de Bros vient d'être désigné comme directeur du théâtre municipal de Berne, et depuis – vous pouvez l'imaginer – tout le monde se demande à Berne: Qui est ce de Bros, qu'est-ce qu'il pense, qu'est-ce qu'il peut?

 

Les faits, bien entendu, sont connus. L'homme qui dirigera la troupe de la capitale à partir de 1987 est né à Genève en 1945 – il a donc 40 ans. Il a fait les écoles à Bâle, puis l'école normale à Berne. Mais au lieu de devenir professeur, il travaille à Genève, au Grand Théâtre, comme assistant-metteur en scène, puis il va aux États-Unis, pour apprendre le métier de metteur en scène, auprès du "Curtis institue of music". Suivent trois ans à New York comme metteur en scène principal du New York City Opera. Il se fait engager par l'opéra de Zurich, où il devient collaborateur de Claus Helmut Drese, puis à partir de 1981, il travaille à Lucerne, comme directeur du théâtre municipal. C'est un théâtre du style allemand, c’est-à-dire qu'on y joue 320 fois par an, avec une troupe régulière qui s'occupe aussi bien de l'opéra, de l'opérette, du musical, du ballet et de la comédie.

 

Ce weekend, j'ai rendu visite à Philippe de Bros afin d'apprendre qui il est et afin de voir son travail comme metteur en scène, puisque samedi passé, il a présenté la première de "La Cenerentola", opéra qu'on pourra voir cet été à Lausanne.

 

(Musik)

 

"La Cenerentola" de Lucerne, sous la direction d'un jeune romand, Olivier Cuendet. La presse lucernoise en était ravis. La "Nouvelle Gazette de Lucerne" par exemple relève l'habileté et le professionnalisme du chef d'orchestre, et le quotidien "Luzerner Tagblatt" constate: "Il fait très longtemps qu'on n'entendait une interprétation aussi précise, aussi lucide et aussi fraîche, même dans les détails les plus fins. En choisissant Olivier Cuendet, Philippe de Bros a prouvé son talent de découvrir de jeunes artistes. Et le début du nouveau chef n'aurait pas pu être plus brillant." - Donc un succès, un succès pour toute l'équipe. Parmi les spectateurs, un groupe de Strasbourg, les amis du théâtre lyrique:

 

(Wort)

 

Le succès que Philippe de Bros a trouvé comme directeur de la troupe et comme metteur en scène tient à sa capacité de s'adapter à chaque situation et d'en faire le mieux. Pour les costumes de "La Cenerentola", par exemple, il n'a pas dépensé un sou, et la décoration ne faisait que 6'000 francs, une somme tout à fait ridicule. En compensation, Philippe de Bros a travaillé avec intensité, et il a fait ressortir les finesses de la musique et du livret par les gestes de ses chanteurs.

 

(Wort)

 

Cette capacité de s'adapter à la situation en en faisant le mieux, Philippe de Bros a dû la développer dès son début à Lucerne, puisqu'il lui était interdit de changer quoi que ce soit pendant sa première saison. Les transformations se sont donc faites petit à petit, et je pense qu'à Berne aussi, Philippe de Bros cherchera plutôt l'évolution imperceptible au lieu de la révolution bruyante.

 

(Wort)

 

Philippe de Bros est un homme très réaliste, même pragmatique, et à cause de cela pas forcément un artiste. Il s'en est rendu compte lui-même, et une fois à Berne, il renoncera à la mise en scène pour se vouer entièrement à la gérance du théâtre, à la quête de son idéal: l'harmonie. Toute la troupe devrait se sentir comme une seule famille, où chacun accepte son concurrent.

 

(Wort)

 

Ce n'est pas seulement par cette vision que Philippe de Bros m'a impressionné lors de ma visite à Lucerne. C'est plutôt parce qu'il a cette franchise que vous trouvez seulement parmi les grands directeurs. Les petits – c'est une expérience que j'ai fait plusieurs fois – les petits directeurs essayent de voiler leur médiocrité en parlant d'une façon évasive, obscure, ou alors il font l'important. Bien évidemment, c'est un comportement qui est dicté par la méfiance, par la peur de perdre de l'estime en dévoilant ses vraies pensées, son vrai caractère. Le bon directeur par contre, comme toute forte personnalité, vous donne le sentiment d'être accepté, parce qu'il vous fait confiance. Il vous dit ce qu'il pense, aussi bien ce qu'il craint que ce qu'il espère. Avec Philippe de Bros comme directeur, les artistes savent à quoi se tenir. Un bon augure pour son travail à Berne, à partir de 1987.

 

(Wort)

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